Des appels ciblés pour sensibiliser à la vaccination HPV dans le Val-de-Marne

1 avril 2025

Johana CASTRIQUE
Directrice de la Relation Client, de l’Accès aux Droits et de la Promotion de la Santé à la CPAM 94

Content 3

Depuis plusieurs années, l’Assurance Maladie du Val-de-Marne a mis en place des actions de proximité pour améliorer l’accès aux droits et aux soins, dans une démarche qui s’est amplifiée depuis le Covid.
Nous avons pour ce faire des échanges très réguliers avec la délégation ARS du 94 avec laquelle nous échangeons sur des sujets partagés, notamment la vaccination HPV.

Les résultats de la campagne de vaccination en milieu scolaire dans le Val-de-Marne sont mauvais, le département étant classé avant-dernier parmi les départements franciliens en termes de couverture vaccinale.
Nous avons l’habitude de réaliser des appels sortants pour des actions de sensibilisation, comme pour la promotion des dépistages organisés des cancers. Nous avons donc décidé d’utiliser cette expérience pour la campagne de vaccination contre le HPV.
Le dispositif a été testé pour la première fois à Valenton, sur deux collèges, pendant une semaine, avec 5 jours d’appels. Les résultats montrent une progression modeste, passant de 8% à 24%, mais cette action a tout de même permis de multiplier par trois le nombre d’autorisations parentales pour la vaccination HPV.
Étant donné le grand nombre de personnes à contacter, nous avons donc recentré sur les populations les plus vulnérables avec des taux de vaccination les plus faibles, et dans les villes sous CLS (contrat local de santé) avec un IDH 2 faible. »

L’enjeu, pour l’Assurance maladie, est de s’inscrire dans une approche de réduction des inégalités de santé.

Ce qui signifie concrètement que nous ciblons prioritairement les populations qui sont habituellement moins réceptives aux messages de prévention et ou qui ne vont pas nécessairement faire vacciner leurs enfants via la médecine de ville.
L’objectif pour nous était d’éviter l’amplification des inégalités sociales en santé.

L’étape préalable était d’identifier les communes et les établissements à cibler, nous avons choisi pour ce faire, un certain nombre d’indicateurs.
Tout d’abord les taux de vaccination de la campagne précédente, qui étaient faibles et ce, quelle que soit la commune.
Puis nous avons recoupé ces chiffres avec le nombre de vaccins achetés en ville pour voir s’il n’y avait pas un transfert de la vaccination du milieu scolaire vers la médecine de ville.
Ensuite, nous avons ciblé les communes avec l’indice de précarité socio-économique, en reprenant les données INSEE et les villes sous contrat local en santé (CLS), pour finir par cibler les collèges et enfin nos assurés.  
La complication réside dans le fait que l’entrée principale à l’Assurance Maladie concerne nos assurés, tandis que les personnes éligibles à la vaccination en milieu scolaire sont des ayants-droit*.

Nous pouvons pour cela interroger nos bases de données. Ainsi, nous avons commencé par identifier tous les assurés résidant dans les villes ciblées, ayant un ayant-droit en âge de se faire vacciner en milieu scolaire.
Nous avons ensuite croisé ces informations avec la carte scolaire afin de nous assurer que la ville où résident l’assuré et l’ayant-droit figure bien parmi les établissements ciblés pour la vaccination.

65457727 xl recadre

Nous disposons déjà d’un groupe d’agents réalisant des appels sortants, une pratique qui dure depuis environ 10 ans grâce à nos éducateurs en santé. Nous avons également testé une plateforme locale avec des agents recrutés spécifiquement pour ces appels, formés par le CRIPS et la DT ARS 94 afin d’être bien préparés, et sécurisés sur les éléments de langage en étant capables de répondre aux questions éventuelles des personnes contactées. Une fois les appels sortants réalisés, nous effectuons un suivi statistique en temps réel via un tableau de bord. Ce dernier permet d’identifier les raisons pour lesquelles certains parents choisissent de ne pas faire vacciner leurs enfants, ce qui nous permet d’ajuster nos éléments de langage en fonction des retours.

Sur le volet qualitatif, les parents sont souvent surpris par la démarche, mais une fois cet effet de surprise passé, ils sont satisfaits d’avoir un moment d’échange pour poser leurs questions sur la vaccination contre le papillomavirus (HPV).
Cette vaccination étant peu connue et entourée d’idées reçues, de nombreuses questions portent sur ses effets et ses bénéfices. Par ailleurs, certains parents, déjà sensibilisés, nous indiquent qu’ils sont d’accord avec leur médecin traitant pour la vaccination.
En termes quantitatifs, nous avons déjà contacté 4060 parents. Parmi ceux que nous avons pu joindre, 60 à 70 % ont exprimé leur intérêt et leur volonté de faire vacciner leurs enfants. Cependant, il reste à vérifier si ces intentions se traduisent effectivement par des vaccinations. Nous suivons donc activement l’évolution du nombre d’autorisations parentales. À la fin de la campagne, nous réaliserons une étude d’impact pour mesurer le nombre de vaccins effectivement administrés.

Les appels sortants ont permis de mettre en lumière plusieurs points déjà connus. Tout d’abord, il existe un frein important lié à la perception des HPV comme un problème uniquement féminin, alors que les hommes sont également porteurs du virus. Cette idée que la vaccination ne concerne que les jeunes filles constitue un premier obstacle.
Le deuxième frein est d’ordre économique et social.
La vaccination contre les HPV mettent en lumière les inégalités sociales en santé, car les personnes en situation de précarité, comme celles bénéficiant de la C2S (Complémentaire Santé Solidaire), et/ou allophones, sont souvent moins vaccinées que les autres. Ces personnes sont par ailleurs généralement moins réceptives aux canaux de communication classiques. Le dernier obstacle réside dans les nombreuses idées reçues et interrogations concernant le HPV et son efficacité, ce qui nécessite un réel travail pour dissiper ces fausses croyances.

Concernant les leviers pour améliorer la situation, la réussite de la vaccination repose en grande partie sur une meilleure coordination des acteurs. Dans le Val-de-Marne, par exemple, un comité départemental réunit les acteurs de la prévention (DT ARS94, CPAM, Conseil départemental, etc.), ce qui représente un levier pour optimiser la vaccination et d’autres actions de prévention.
Un autre levier est la segmentation de la communication. Beaucoup d’assurés ne sont pas réceptifs à la communication générale, soit en raison de la barrière linguistique, soit parce que le message n’est pas adapté à leur situation. La segmentation des publics et une communication ciblée représentent des leviers efficaces pour toucher ces populations.
Nous sommes en train par ailleurs en train d’expérimenter d’autres modes de communication comme la communication digitale pour pousser des messages de communication en fonction des profils.
Cela peut être utile pour sensibiliser les parents, et les enfants sur l’utilité de la vaccination. Aussi dans le Val-de-Marne, nous avons par ailleurs déployé des focus groupe et des enquêtes pour aller directement donner la parole aux assurés, en cherchant à connaître les réticences à faire les dépistages organisés des cancers, ou la vaccination, et adapter ensuite notre communication. 

*Les assurés sont les personnes affiliées à l’Assurance Maladie, telles que les travailleurs salariés, les travailleurs indépendants (artisans, commerçants, etc.), et d’autres affiliés à différents régimes. Les ayants-droit, quant à eux, désignent les personnes rattachées à un assuré, jusqu’à ce qu’elles deviennent autonomes.

NOS FLASHS INFOS

NOS NEWSLETTERS

NOS SUPPORTS DE COMMUNICATION

NOS APPELS
À PROJETS